Quels sont les sujets de réglementation concernant les poêles à granulés actuellement en discussion au niveau de l’Europe ?
Deux dossiers sont actuellement à l’étude à Bruxelles qui concernent directement les appareils à granulé. Le premier d’entre eux prévoit la fusion des étiquettes énergétiques de catégories disparates d’appareils de chauffage comme les poêles et inserts à bois ou granulé, les pompes à chaleur ou encore les radiateurs électriques. Sous prétexte de simplification pour l’utilisateur final, ces différents matériels seront regroupés dans une même classe, avec pour conséquence un classement en catégorie E de la quasi-totalité des appareils à bois ou à granulés, alors que les PAC seraient toutes classées en catégorie B et C. En effet, ces dernières bénéficient d’un COP avantageux équivalent à un rendement d’environ 300% quand les poêles à granulés sont limités par la force des choses à des rendements forcément inférieurs à 100%.
Quelles seraient les conséquences pour l’industrie des poêles à granulé ?
D’une part, tous les appareils à bois ou à granulé étant classés E, avec une quasi impossibilité d’atteindre la classe supérieure D, cet étiquetage ne permettra pas de distinguer les appareils les plus performants et donnera une image négative au grand public de l’ensemble de ces produits. Plus gravement, un règlement européen interdit aujourd’hui aux Etats de subventionner les matériels classés en dessous de la classe C. Cela pourrait signifier en France par exemple la fin de MaPrimRénov’ ou de la TVA réduite pour les appareils à bois et à granulé, avec des conséquences particulièrement néfastes sur le niveau du marché dans les années à venir. Enfin, ce classement E donnera des arguments aux détracteurs du chauffage aux granulés et aux promoteurs du « tout électrique » pour entraver le développement de cette solution de chauffage. Ils sont nombreux aujourd’hui à vouloir s’emparer de la part de marché prise par les appareils à granulés, ou à vouloir s’accaparer une ressource de biomasse bois pour d’autres usages (biogaz, biokérosène …)
Cette évolution est-elle inéluctable ?
Ce processus de révision de l’étiquette énergie arrive à son terme et une décision finale interviendra dans les prochains mois. Il s’agit d’un règlement européen qui ne passe pas par un vote au parlement, mais les états sont consultés et une opposition forte des états peut encore infléchir la décision. Le SER est mobilisé depuis de longs mois pour sensibiliser l’administration française sur le sujet et agit de concert avec le syndicat européen CEFACD (Comité Européen des Fabricants d’Appareils de Chauffage et de Cuisson Domestiques) qui est l’interlocuteur privilégié auprès des régulateurs européens pour faire valoir les nombreux arguments plaidant contre cette fusion des étiquetages : aucune « simplification » pour les particuliers à mélanger les torchons et les serviettes, relégation arbitraire des poêles à granulé de la catégorie actuelle A+ vers la classe E, en ignorant le caractère écologique, économique, local et renouvelable de ce moyen de chauffage. Sans parler de l’origine souvent fossile (gaz ou même charbon) de l’électricité pour faire tourner en plein hiver un parc croissant de pompes à chaleur électriques. Les poêles à bois et à granulé sont pourtant le parfait complément des chauffages électriques et des pompes à chaleur pour écrêter les pics de consommation de chauffage au cœur de l’hiver.
Et quel est le deuxième dossier en discussion en Europe ?
Il s’agit de la révision du règlement Ecodesign qui devrait entrer en vigueur à l’horizon 2026/2027. On se souvient du règlement Ecodesign 2022 qui a fixé les niveaux minima de performance (rendements, émissions) pour les appareils à bois et à pellets. Ce règlement a imposé de lourds investissements aux industriels pour renouveler leurs gammes et atteindre les seuils de performance requis. La commission a lancé en début d’année les consultations pour révision de ce règlement, avec l’objectif de tirer vers le haut les performances techniques et environnementales de ces produits. Les premières pistes de travail ont été dévoilées ce mois-ci. Elles sont étudiées attentivement et feront l’objet d’une contribution du SER. Il est indispensable de s’assurer que les objectifs d’amélioration n’aillent pas au-delà de ce qui est techniquement réalisable, ou n’entrainent pas de surcoûts de production considérables, ce qui pourrait conduire à une forte baisse voire une disparition du marché des appareils indépendants de chauffage au bois ou aux granulés. La vigilance et l’implication des organisations professionnelles et de tous les industriels du secteur est indispensable pour éviter qu’un règlement européen déconnecté des réalités du terrain vienne compromettre l’avenir de toute la filière du chauffage aux granulés.